L'expression traditionnelle pour caractéristiser la problématique didactique en langues-cultures est celle de l"l'enseignement-apprentissage", à tel point que la lexie est devenue pratiquement obligée, et même utilisée par certains étudiants alors même qu'il ne s'agit en contexte que d'enseignement, avec des énoncés tels que "les enseignants sont invités à innover dans leurs pratiques d'enseignement-apprentissage"...
On aurait dû être surpris depuis longtemps par le fait qu'à l'inverse un troisième terme manquait pour compléter l'expression, celui d'"usage". Voici quelques arguments mobilisables à ce propos, dont certains se recoupent :
1) L'objectif ultime des cours de langue-culture n'est ni l'enseignement, ni l'apprentissage, mais l'usage que les apprenants pourront en faire ensuite.
2) L’usage intervient constamment en classe de manière non simulée lorsque les apprenants utilisent la L2 pour s’exprimer personnellement et travailler, que ce soit sur des documents authentiques ou à propos des activités qu'ils réalisent en classe.
3) L’approche communicative vise la compétence de communication en L2 dans des situations de la vie quotidienne. C’est pourquoi, au moins à la fin de chaque unité didactique, on propose aux apprenants une simulation d’usage dans la société étrangère.
4) Dans le FOS et le FOUS, et autres modèles de cours sur objectif spécifique, c’est par l’analyse préalable de l’usage visé de la langue que l'on détermine les contenus d’enseignement.
5) La "perspective actionnelle" (ou "action-oriented approach", dans la version originale anglaise du CECR de 2001) se base sur une forme d'usage de la langue, à savoir la langue comme moyen d'action sociale.
6) Dans les évaluations sommatives et certificatives, on n’évalue ni l’enseignement, ni l’apprentissage, mais la compétence d’usage.
7) Enfin, last but not least, le principe sans doute le plus important de la didactique des langues-cultures est le principe d'"homologie fin-moyen": on apprend à communiquer en L2 en communiquant en L2 en classe; on apprend à agir socialement en société en agissant socialement en classe (d'où le modèle pédagogique de la pédagogie de projet, fondé sur ce principe appliqué à l'agir citoyen). Et les autres types d'activité (le travail d'entraînement aux différentes "activités langagières" et les exercices langagiers) ne viennent qu'en étayage de ce principe, qui consiste à considérer l'usage comme le moyen priviligié de l'enseignement-apprentissage.
Pour ma part, j'ai donc décidé de ne parler désormais, quand il s'agit de la problématique didactique globale, que d'"enseignement-apprentissage-usage".